Reporting de durabilité : le DAF doit-il devenir un expert des microplastiques ?​

Reporting de durabilité : le DAF doit-il devenir un expert des microplastiques ?​
  • 24 nov. 2023

Avec la CSRD, l’élargissement et la normalisation du reporting de durabilité pour plus de transparence et de comparabilité représentent à la fois une contrainte et une opportunité pour les entreprises. Les Directions financières l’ont bien compris : en France, près d’une sur deux souhaite profiter de la mise en œuvre de cette directive pour en tirer parti au-delà de la conformité réglementaire. 

 

La disponibilité d’indicateurs ESG permet en effet d'évaluer plus précisément l’impact des facteurs sociaux et environnementaux sur l’entreprise (comme les conséquences du changement climatique sur la chaîne d’approvisionnement) afin d’anticiper les risques, de prendre des décisions plus éclairées (par exemple en matière de modèle économique ou de développement produit) et d’avoir une compréhension plus globale de la performance. Plus largement, le reporting de durabilité accompagne l'entreprise dans sa démarche de transformation, renforçant ainsi la confiance des financeurs dans sa pérennité.

 

Les indicateurs d'impact dont l’entreprise devra rendre compte dans le cadre de la CSRD sont extrêmement variés. Ils peuvent aller des émissions de gaz à effet de serre à la pollution par les microplastiques, en passant par les accidents du travail ou encore les écarts de rémunération. Quelles conséquences les Directions financières doivent-elles anticiper en termes de compétences et d'organisation ?

 

À l’occasion de la publication de l'étude Priorités des Directions financières 2024 par PwC et l’Association des Directeurs Financiers et de Contrôle de Gestion (DFCG), Laurent Morel,​ Associé Consulting Finance,​ PwC France et Maghreb, et Jean-Baptiste Petit,​ Directeur Développement durable​, PwC France et Maghreb, reviennent sur le changement de paradigme que constitue la prise en compte de la performance globale par la Direction financière. ​Cette dernière a en effet un rôle central à jouer pour apporter les clés nécessaires aux décisions de l’entreprise et favoriser une création de valeur durable.

Lire l'intégralité de l'étude

Priorités des Directions financières 2024

Comment la Direction financière peut-elle accompagner une entreprise qui commence à piloter sa performance globale ?

Laurent Morel -  Le new normal des entreprises est d’appréhender leur performance dans une vision globale : l'objectif n'est plus d'opposer profit, planète et personnes, mais de développer une compréhension d'ensemble. L’information extra-financière devra parvenir au même niveau de fiabilité que l’information financière. C’est une condition nécessaire pour inscrire la vision de la performance dans le long terme et adopter un modèle d'affaires durable. 

En Europe, avec la CSRD, le reporting porte à la fois sur l'impact environnemental et social de l'entreprise sur ses parties prenantes, mais aussi sur les risques et opportunités que les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) présentent pour l'entreprise : il s’agit de la double matérialité.

Pour accompagner l’entreprise dans sa prise en compte de cette performance globale, la Direction financière doit elle-même intégrer, en lien avec les données financières, toutes ces données extra-financières permettant d'avoir une incidence globale sur les objectifs stratégiques de l'entreprise, l'évaluation des ressources et du capital à allouer ainsi que la valeur de l'entreprise. 

54 %

des Directions financières prévoient d’intégrer des éléments RSE dans les revues de performance

Ecoutez le replay de PwC en Direct avec Christophe Babule, Group Chief Financial Officer, L’Oréal

Quels sont les enjeux de formation des Directions financières en matière de reporting de durabilité ?

Jean-Baptiste Petit -​ Une montée en compétences RSE est nécessaire pour intégrer la durabilité à la fois dans la vision stratégique et dans les opérations du quotidien. Il importe tout d’abord de bien comprendre les implications de la réglementation :

  • sur le contenu du reporting à produire (informations qualitatives et quantitatives),

  • sur la gouvernance de ce reporting (par exemple, la responsabilité du comité d'audit),

  • sur l'évolution des processus attendus (création ou renforcement du contrôle interne sur les données ESG),

  • sur les données elles-mêmes et les outils (tels que le tagging des informations).

Pour cela, la formation de la Direction financière est une première étape indispensable, et ce à tous les échelons. Sans avoir à devenir un expert des microplastiques, le DAF doit être formé aux enjeux de durabilité afin de jouer le rôle qui lui revient dans la transformation de l’entreprise vers la création de valeur de long terme.

Former les collaborateurs « est plus que simplement préparer le terrain », explique Fiona Cloarec, Responsable de la finance durable du Groupe Michelin, dans ce témoignage. « C’est permettre à l’intelligence collective de s’exprimer sur des sujets techniques, nombreux et transverses, et aussi de saisir les opportunités offertes par la CSRD. »

Lire aussi : Développer de nouvelles compétences pour mieux intégrer les enjeux RSE

La Direction financière est-elle prête à garantir la qualité et la fiabilité des données extra-financières, comme elle le fait avec l’information financière ?

Laurent Morel - D'ici 2028, un niveau d'assurance similaire à celui des données financières sera attendu pour les données extra-financières. Aujourd’hui, le reporting de durabilité n’a pas encore atteint ce degré de robustesse mais les Directions financières ont déjà acquis une maîtrise de la mise en qualité de données financières, avec :

  • des processus et une organisation adaptés en place,

  • une documentation étoffée,

  • une gestion des risques et un contrôle interne à l'appui,

  • une maîtrise des outils de consolidation et de pilotage de la performance. 

Cette expérience peut être mise à profit pour déployer une organisation et des outils au service de la montée en robustesse du reporting de durabilité.

Lire aussi : Fiabiliser les systèmes d’information pour se préparer au reporting de durabilité

44 %

des Directions financières souhaitent engager leur entreprise, au-delà de la conformité, dans une démarche de transformation RSE

Quelles sont les caractéristiques d’une organisation alliant finance et RSE ?

Jean-Baptiste Petit -​ La Direction financière dispose de plusieurs leviers pour intégrer la RSE dans la stratégie d'entreprise. Pour aider à embarquer la durabilité dans le quotidien de l'organisation, le pilotage du reporting et les systèmes de contrôle, elle peut notamment :

  • Utiliser son expérience de l’information financière pour apporter de la confiance dans les données ESG ;

  • S'appuyer sur un réseau existant d'interlocuteurs dans toute l'organisation (tout le monde a un budget) ;

  • Promouvoir une étroite collaboration avec la direction RSE et les métiers, qui ont une connaissance concrète des sujets de durabilité.

Il est également envisageable de créer de nouveaux postes, par exemple de Chief Sustainable Finance Officer ou Chief Value Officer, qui établissent des ponts entre finance et RSE au service de la performance globale de l'entreprise. Leur mission sera d’intégrer la durabilité au cœur des décisions de gestion en prenant en compte des indicateurs clés de performance extra-financiers dans la comptabilité et le contrôle de gestion de l’organisation.

Lire aussi : Vers l’entreprise full RSE - Interview de Frédéric Regert, DGA Finances, IT & Transformation du Groupe Rossignol

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Priorités des Directions financières 2024

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Laurent Morel

Laurent Morel

Associé Consulting Finance, PwC France et Maghreb

 Jean-Baptiste Petit

Jean-Baptiste Petit

Directeur, Développement durable, PwC France et Maghreb

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