Quelles aides publiques pour financer la transition énergétique ?

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  • Publication
  • 18 mars 2024

Les entreprises industrielles engagées dans une démarche de décarbonation de leurs activités disposent de nombreuses incitations, telles que les aides publiques et crédits d’impôt, pour financer cette transformation. Ces aides sont également attractives pour les fonds d’investissement détenteurs ou à la recherche d’actifs industriels à décarboner. 

 

Mais comment s’y retrouver dans le maquis de subventions, prêts et crédits d'impôt disponibles ? Comment monter le bon dossier auprès des divers guichets de l'État ? Deux directeurs de PwC Société d’Avocats, Stanislas Bocquet, et Fabien Radisic, expliquent comment tirer parti de ces opportunités de financement. 

 

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Pourquoi des aides publiques à la transition énergétique ?

Stanislas Bocquet - Dans un contexte réglementaire incitant à la décarbonation des entreprises, ces dernières doivent désormais évaluer leurs chaînes d’approvisionnement et leurs processus industriels pour s’assurer d’une bonne compréhension des risques à anticiper mais aussi des opportunités à saisir sur le plan environnemental. Selon les acteurs, les opportunités des aides à la décarbonation sont de deux ordres : faciliter et accélérer l’implantation de sites industriels en France et financer les projets de transition verte. 

À l’inverse, ne pas saisir ces opportunités - ou tarder à le faire - expose les entreprises concernées à plusieurs risques. Le principal est de fragiliser ses marges et de dégrader sa compétitivité face à des concurrents plus proactifs dans la recherche de ces aides.

Mettre en place des solutions environnementales est plus onéreux que renouveler son outil de production à l’identique. Mais l’incitation à en améliorer la performance environnementale prime désormais. Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) est un bon exemple de mesure à prendre en compte. Cette taxe européenne, qui s’applique à certains produits (métaux, ciment, etc.) selon leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), peut inciter des industriels internationaux à s'implanter en France plutôt que d'importer.

Au-delà du reporting de durabilité mis en place par la réglementation européenne, les industriels français ont une opportunité à saisir pour opérer leur transition énergétique et décarboner leurs opérations, notamment en activant les options de financement permises par les aides publiques.

Fabien Radisic, Associé, spécialiste des aspects fiscaux au sein du département Deals et ESG leader de PwC Société d'Avocats

Quel est le paysage de ces financements ?

Stanislas Bocquet - Depuis 2020, les conditions économiques, la crise sanitaire et l’envolée des prix de l’énergie ont poussé les pouvoirs publics à multiplier les aides aux entreprises à différents niveaux : NextGeneration EU, Horizon Europe, innovation Fund et FESI en Europe (160 milliards d’euros au total), plan France Relance (100 milliards d’euros) et France 2030 (54 milliards d’euros) à l’échelle nationale. À date, plus de 1 880 dispositifs de subventions publiques ciblées sont accessibles aux entreprises pour financer leur innovation, accélérer leur décarbonation ou améliorer leur compétitivité.

Ces aides financières composent un paysage complexe (subventions, crédits d'impôt, prêts) et fragmenté. En France, les principaux acteurs chargés d’étudier les dossiers pour accorder les subventions (ou finançant ces dernières) sont l’Ademe, Bpifrance, la Direction générale des entreprises (DGE) et les collectivités locales, au premier rang desquelles les Régions, qui cherchent à attirer les investisseurs.

Parmi ces aides, les opportunités les plus importantes concernent la transition écologique et énergétique : financement des coûts d’investissement, industrie zéro fossile, développement de l’hydrogène et de l’électricité vertes, économie circulaire. Des aides existent également en faveur de l’innovation et de la R&D, principalement dans le cadre de projets collaboratifs impliquant des organismes publics et des partenaires d’autres pays de l’Union européenne. 

Les aides sont attribuées après par des appels à projets (AAP). À noter qu’elles peuvent faire l’objet de conditions plus restrictives pour les grandes entreprises que pour les PME et ETI.

Pouvez-vous nous donner des exemples de projets financés ?

Fabien Radisic - PwC Société d’Avocats accompagne des entreprises de toutes tailles et de tous secteurs dans leurs recherches de financements publics de la décarbonation. En voici quelques exemples.

Problématique​ : décarbonation de l’industrie – Renouvellement outil industriel ​ 

Appel à projets : DECARB IND (industrie zéro fossile du plan France 2030 − Plan de Résilience − Transition écologique porté par l’ADEME)

Résultat : investissement soutenu à hauteur d’1,8 M€

Problématique​ : remplacement du gaz par une chaudière biomasse​ ​ 

Appel à projets : Industrie zéro Fossile Volet 1 (BCIAT) - Fonds chaleur - porté par l’ADEME

Résultat : accompagnement de 4,6M€

Problématique​ : s’inscrit dans la stratégie d’accélération pour la digitalisation et la décarbonation des mobilités​ ​ ​ 

Appel à projets : Logistique 4.0 du 4e Programme d'investissements d'avenir (PIA4)

Résultat : dossier validé par l’ADEME

Problématique​ : nouveaux équipements d’extrusion permettant d’intégrer 45% de matière première issue du recyclage dans la fabrication de profilé en PVC blanc

Appel à projets : Objectif Recyclage Plastiques (ORPlast)

Résultat : dossier validé suite au dépôt final

Problématique : dans le cadre du plan de résilience économique et sociale​ 

Appel à projets : Aide Gaz / Électricité – Plan de résilience​ ​ ​

Résultats : 7 M€ de subventions de la part de l’État

Quelles sont les particularités du dernier dispositif voté, le C3IV ?

Fabien Radisic - Le crédit d’impôts au titre des investissements en faveur de l'industrie verte (C3IV) permet d’obtenir un crédit d’impôts de 20% des dépenses d’investissement, voire 25% ou 40% selon la zone de réalisation des investissements (ZAFR, Outre-mer). Ce crédit d’impôts est immédiatement restituable, notamment si l’entreprise éligible est déficitaire pendant la phase d’investissement du projet. 

Les filières ciblées par ​ce dispositif sont les batteries, panneaux solaires, éoliennes et pompes à chaleur. Les activités concernées sont avant tout la fabrication des équipements et composants essentiels ; l’extraction, la production et la transformation des matériaux critiques ; ainsi que la valorisation des matières premières critiques.

Un agrément préalable, délivré par la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) après avis conforme de l’ADEME, est nécessaire pour bénéficier du C3IV. Une demande peut être déposée jusqu’au 31 décembre 2025. 

Dans ce cadre, l’entreprise porteuse du projet devra justifier qu’au moins 50% du chiffre d’affaires généré par l’investissement de production sera réalisé avec des entreprises exerçant des activités en aval dans l’une des quatre filières ciblées. Ce critère s'apprécie projet par projet, à l’échelle d’une usine ou d’une chaîne de production par exemple tant que la traçabilité du revenu est assurée, et non au niveau de l'entreprise.

Par ailleurs, l’entreprise devra démontrer que son plan d’investissement est économiquement viable. Il est donc essentiel de fournir une documentation (modèle financier, études de marché, lettres d’intérêt de clients potentiels, etc.) suffisamment robuste pour obtenir cet agrément.

Qui compose l’équipe chargée de la recherche de financements publics de décarbonation ?

Stanislas Bocquet - Dans l’industrie, l’équipe projet en recherche de financement fait partie de la direction technique, de la direction industrielle ou de la direction R&D de l’entreprise. Lorsque l’objectif premier de l'investissement est la décarbonation, la direction RSE fait partie de l’équipe.

Si ces porteurs de projet sont naturellement au cœur de la démarche, ils gagneraient cependant à être accompagnés par d’autres parties prenantes en interne. Par exemple, nous avons vu chez un acteur des technologies de paiement l’avantage de mobiliser la direction financière. Celle-ci peut en effet faciliter la recherche de financements en mettant en place des outils, en faisant appel à un conseil extérieur et en orchestrant un reporting global utile compte tenu de la multiplicité et de la complexité des dispositifs. Il est encore plus nécessaire de centraliser la recherche d’aides dans le cas des entreprises multinationales

Quelle gestion du temps pour obtenir cette aide financière ?

Fabien Radisic - Se lancer dans une quête de financement doit avoir lieu au moment opportun. D’une part, cela doit s’inscrire dans la stratégie ESG de l’entreprise (ou, de plus en plus souvent, dans le pilier ESG de sa stratégie globale). D’autre part, la recherche de capacité industrielle supplémentaire doit répondre à une demande client suffisamment forte pour légitimer l’investissement.

Une fois cela établi et la décision prise d’engager un projet industriel décarboné, il convient de se poser immédiatement la question du financement. Selon le périmètre de la recherche d’aides publiques, il faut ensuite compter de six semaines à trois mois pour identifier les financements pertinents auxquels l’entreprise peut prétendre. Les délais sont l’une des difficultés à prendre en compte, car constituer un dossier et attendre la réponse de l’organisme sollicité peut prendre de quelques semaines à plusieurs mois selon les budgets, la complexité et les enjeux du dossier.

Quelles sont les difficultés rencontrées ?

Fabien Radisic - L’entreprise doit tout d’abord s’assurer de sélectionner le dispositif qui correspondra le mieux à son projet, le cas échéant en associant plusieurs financements s’ils sont cumulables. Elle doit ensuite mettre toutes les chances de son côté - et si possible du temps - en identifiant les bons interlocuteurs et en déposant le meilleur dossier possible. 

Une erreur classique est de se tromper d’argumentaire en l’orientant sur ses propres enjeux en ignorant les objectifs spécifiques du guichet auquel on s’adresse. Or l’aspect stratégique dans la présentation du dossier n’est pas à négliger. Les experts PwC maîtrisent les paramètres d'éligibilité des dépenses et aident l’entreprise à en obtenir un meilleur taux de réussite dans ses démarches.

Un autre piège est de ne pas connaître ou prêter attention aux règles administratives de gestion d’un dossier. Par exemple, lors du reporting des dépenses, une entreprise peut se voir refuser le versement de tout ou partie de l’aide lorsque les dépenses financées sont engagées par une autre entité d’un même groupe que celle qui a déposé le dossier - une erreur qui ne peut être corrigée. Un accompagnement permet de respecter dans leur intégralité les règles administratives en vigueur. 

Enfin, une entreprise bien accompagnée n’a rien à craindre des contrôles a postériori. Dans le cas des crédits d’impôt, le traitement fiscal n’est pas forcément aligné sur le traitement comptable. Si la demande est mal rédigée, l’industriel pourrait ne pas percevoir toute l’aide espérée, ou s’exposer à un correctif lors d’un contrôle fiscal. Des changements législatifs peuvent aussi avoir lieu, qu’il convient de suivre de près.

Pourquoi un accompagnement pluridisciplinaire ?

Stanislas Bocquet - La complémentarité des compétences fait la force des équipes de PwC et permet de prendre en compte toutes les spécificités de nos clients.

  • Nos consultants et avocats spécialisés dans la mobilisation des outils de financement accompagnent nos clients dans l’identification, le montage, la soumission et le suivi des dossiers d’aides publiques régionales, nationales et européennes. Ces équipes capitalisent notamment sur leur expérience dans l’obtention et la gestion de subventions européennes (fonds H2020, CEF blending call, NR300 EU Programme et Innovation Fund​). Elles aident nos clients à définir leur feuille de route stratégique et à répondre aux attendus des marchés cadres​. 

  • Intégré au réseau PwC Global R&D Incentives Services, le département Financement de l’Innovation de PwC Société d’Avocats, référencé Conseil CIR par le Médiateur des entreprises​, accompagne des centaines de clients en France et dans 35 pays. Il identifie les subventions applicables aux travaux de R&D, ainsi que les dispositifs fiscaux tels que le crédit impôt-recherche (CIR) et l’IP Box.

  • Enfin, nos équipes spécialisées dans le développement économique des territoires sont expertes dans la recherche de subventions dédiées à l’industrie (décarbonation, énergie verte, compensation des factures d’énergie) et aux projets innovants (tels que la logistique 4.0)​, en lien avec les grands acteurs publics régionaux, nationaux et européens.

Lire aussi : Crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte : quelles opportunités pour les industriels éligibles ?

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