Dans un environnement économique incertain et volatile, la pratique rigoureuse du costing redevient un enjeu important pour les entreprises. Certaines, qui voient le costing comme une méthode, se contentent d’ajuster ou de refondre leur modèle de calcul des coûts de revient. D'autres en font un élément de la culture d'entreprise permettant, grâce à une lecture multi-dimensionnelle de la structure de coûts, de piloter en continu la performance globale de l'entreprise qui se compose de critères financiers auxquels s'ajoutent des critères environnementaux, sociaux, voire de gouvernance (ESG).
“Il n'existe pas à ce stade de normes ou de pratiques de référence du costing extra-financier”, explique Alexandre Le Cam, Directeur Consulting Finance, PwC France et Maghreb. “Cependant, de plus en plus d'entreprises réfléchissent à intégrer dans leurs modèles de costing le coût des externalités pour enrichir les critères d'investissement et éclairer la prise de décision au regard de la performance globale de leurs activités ou de leurs produits”.
L'un des principaux cas d’usage porte sur les émissions de gaz à effet de serre. Selon le CDP (ex-Carbon Disclosure Project), plus de 2 000 entreprises dans le monde avaient en 2021 mis en place un prix interne du carbone (PIC) ou comptaient le faire dans les deux ans. Les pratiques restent toutefois encore hétérogènes : intégration dans les processus d’investissement, taxe interne pour favoriser les activités plus durables, ou encore calcul et communication d'un résultat financier net de carbone.
“Le costing extra-financier peut également contribuer à identifier les risques et opportunités, voire à transformer le modèle économique de l’entreprise.”
“Des solutions - logiciels d’Enterprise Performance Management (EPM) ou autres outils dédiés au chiffrage - permettent de renforcer considérablement les modèles de costing et de pilotage de la performance, y compris extra-financière”, observe Hasna Marouani, Associée Consulting Finance, PwC France et Maghreb.
Parmi ces avancées technologiques conçues pour accroître la performance du costing de manière générale, plusieurs pourront également faciliter la prise en compte des critères ESG dans le costing :
Nouvelles fonctionnalités d'analyse, de simulation et de modélisation de scenarii ;
Meilleur interfaçage avec le reste du système d’information, dont l’ERP, pour une meilleure traçabilité de l’information ;
Puissance de calcul adaptée au traitement de volumes de données plus importants et à la gestion de cycles d'allocation complexes (cycles itératifs, clés dynamiques, multi-inducteurs…).
Dans les années à venir, les solutions technologiques vont devoir intégrer les données ESG au même titre que les données financières. “Une réflexion est en cours entre les éditeurs logiciels, PwC et nos clients. Une étape a été franchie avec le développement de cas d’usage par les éditeurs. Nous faisons désormais le tri entre les fonctionnalités gadget et les évolutions nécessaires à l’intégration de la dimension ESG dans le costing”, précise Hasna Marouani.
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La CSRD exige des entreprises de faire remonter les données ESG au même niveau de traçabilité, d’intégrité et de rapidité que pour les informations financières. Au sein des Directions financières, les équipes de consolidation commencent à s’y préparer en abordant cette extension de périmètre sous un prisme global : compétences, processus, organisation, outils, collaboration avec les autres services de l’entreprise... Une manière, comme le costing, de participer au positionnement du DAF dans un rôle de Chief Performance Officer.
La combinaison de savoir-faire qui a établi le service de consolidation comme garant d’une information précise, fiable et universelle au sein de l’entreprise en fait aujourd’hui un contributeur essentiel pour répondre aux besoins du reporting de durabilité :
Une expertise dans l’orchestration de la collecte et l’analyse de l’information financière ;
Une connaissance approfondie des outils de reporting ;
Une proximité avec les commissaires aux comptes et la communication externe.
La rigueur méthodologique et le savoir-faire des services de consolidation sont un apport précieux dans un processus aussi pluridisciplinaire que le reporting de durabilité, s’appuyant sur une forte collaboration entre les Directions financières et RSE.
“Les entreprises les plus avancées dans le reporting de durabilité ont pour la plupart bénéficié d’une forte collaboration entre les services RSE et consolidation.”
Un surcroît d’activité est donc à anticiper pour les équipes de consolidation, avec son corollaire de recrutement et de montée en compétences. Ces dernières doivent inclure les dimensions technologiques que les nouveaux enjeux réglementaires accentuent.
Alors que de nombreuses Directions financières s'interrogent sur l’évolution de leurs logiciels de consolidation, de nouvelles solutions offrent de véritables gisements d’optimisation : personnalisation des actions par partie prenante, gestion de volumes de données plus importants et niveaux de reporting plus fins grâce à une puissance de calcul accrue, fonctionnalités collaboratives étendues.
Bien que ces évolutions ne soient pas développées spécifiquement avec une finalité de reporting de durabilité, elles constituent néanmoins une opportunité de mieux intégrer les critères ESG dans les processus de consolidation.
“Les évolutions des logiciels de consolidation seront précieuses pour aider des équipes désormais très resserrées à dégager du temps pour participer sereinement aux réflexions et à se mettre en capacité de relever les défis d’un reporting de durabilité de forte technicité.”
José Baghdad
Associé responsable des activités Finance, Tax and Legal Transformation , PwC France et Maghreb