Économie bleue : de l'énergie aux biotechnologies

La mer apporte des solutions durables

De la flambée des prix de l’énergie à la pénurie de ressources, de notre souveraineté économique à la lutte contre le réchauffement climatique, les mers et océans apportent des réponses aux défis les plus immédiats auxquels nous faisons face.

Un atout particulièrement précieux pour la France : alors que nos terres n’occupent que 0,45% des surfaces émergées du globe, notre espace maritime représente 8% de l’ensemble des zones économiques exclusives (ZEE) mondiales.

Sur la base d’études réalisées sur l’économie bleue par le cabinet, Vladislava Iovkova, associée Strategy&, PwC France et Maghreb, identifie les grandes opportunités à saisir en France métropolitaine et d’outre-mer et revient sur les avantages d’une approche intégrée au service d’une sortie de crise.

L’économie bleue recouvre de nombreuses activités économiques de la France : quelles sont les principales ?

L’économie bleue est l’utilisation durable des ressources océaniques en faveur de la croissance économique, de l’amélioration des revenus et des emplois, de la santé des écosystèmes océaniques. Son périmètre correspond aux ZEE, où les États exercent des droits souverains en matière d'exploration et d'usage des ressources.

L’économie bleue repose sur cinq piliers, chacun incluant des dimensions économiques, sociales et environnementales : ressources marines et biotechnologies (pêche et aquaculture, biotechnologies) ; ressources énergétiques fossiles ou renouvelables ; construction d’équipements marins (défense, marchande, pêche, plaisance) et transport maritime de marchandises ; aménagement (ports, câbles sous-marins), prévention des risques écologiques maritimes, (cybersécurité) et sûreté maritime ; et enfin tourisme et sports nautiques.

Pour chaque pilier, l’activité se répartit sur toute la chaîne de valeur, depuis les études et développement jusqu’à la distribution et l’usage par l’utilisateur final. Production, stockage, transport, installation, exploitation, transformation : chaque étape est un jalon de création de valeur de l’économie bleue.

Pour la France, dont la ZEE est la deuxième au monde, quel est le potentiel de l’économie bleue ?

Pour la France, l’économie bleue représente une énorme opportunité. Avec une superficie de 10,2 millions de km², dont 97% outre-mer, la ZEE de la France est la deuxième plus vaste au monde, juste derrière celle des États-Unis et devant celle de l'Australie. 

L’économie maritime de la France se chiffre en dizaines de milliards d’euros. En termes d’emplois, elle mobilise plus de 414 000 personnes en France métropolitaine, notamment dans six régions qui représentent près de 80% des effectifs. 

Le potentiel de développement économique, social et environnemental de l'économie bleue attire de plus en plus les investisseurs, dont 90% se disent intéressés. Notre rapport s’attache tout particulièrement aux défis et aux avantages que peut représenter l'économie bleue dans un contexte de crise et de tension autour des ressources naturelles, telles que les matières premières et l’énergie.

En matière de souveraineté énergétique, quel est le potentiel des énergies offshore, telles que l’éolien ?

Les énergies fossiles, et notamment leurs exploitations en mer, subissent des freins sociaux, politiques et environnementaux à leur développement. La France, qui ambitionne de devenir la première grande économie décarbonée européenne, se désengage en mettant fin aux financements publics pour les nouveaux projets d’énergie fossile.

Le contexte est donc favorable aux énergies marines renouvelables. Si l’éolien offshore posé et le flottant sont les filières les plus matures, d’autres technologies présentent de réels atouts à plus long terme, telles que la transformation de vent, houle et marée en énergie électrique.

En termes de capacité éolienne installée, la France s’est fixée des objectifs dérivés des ambitions de l’Union européenne. Les entreprises peuvent saisir les opportunités offertes par la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) de 2018 et surtout par le pacte éolien en mer de 2022, qui vise à doter la France d’une cinquantaine de parcs éoliens en mer.

Certaines régions préparent des hubs logistiques portuaires afin de fabriquer et assembler les futures éoliennes. Ainsi, la Bretagne investit 200 millions d’euros pour moderniser le port de Brest et la région Occitanie va investir 250 millions d’euros.

La dynamique est propice pour attirer des industriels majeurs clés pour développer le tissu industriel éolien offshore. Les grands turbiniers, dont les deux leaders mondiaux, ont installé des capacités de production en France afin de servir les marchés attribués par appels d’offre (dont Dieppe - Le Tréport, Fécamp, Courseulles sur Mer, Yeu-Noirmoutier, Saint-Nazaire, Saint Brieuc etc.).  

La France doit maintenant capitaliser sur cette présence pour pérenniser et développer le tissu industriel éolien offshore. Les composants électriques et mécaniques, composants d’assemblage et composants spécifiques à l’éolien en mer présentent un fort potentiel de localisation.

Peut-on conjuguer développement de nouvelles activités maritimes et développement durable ?

Selon Crédit Suisse, 75% des investisseurs ignorent aujourd’hui l’impact de leurs investissements sur le milieu marin et la manière dont cela peut affecter la performance de leur portefeuille. 

Cependant, de plus en plus d’initiatives cherchent à aligner leurs investissements dans l’économie bleue et leurs objectifs de développement durable. Pour prendre l’exemple du secteur financier, la Banque Populaire Grand Ouest est à l’origine de quatre fonds d’investissement maritimes régionaux et d’un livret maritime solidaire. De son côté, la filiale de gestion d’actifs de BNP Paribas a inclus des critères ESG dans son indice, lancé en octobre 2020, couvrant 50 valeurs liées à l’économie bleue (vie côtière, énergie et ressources maritimes, pêche et produits de la mer, réduction de la pollution en mer, transport maritime).

De même, la société de gestion française Go Capital, basée à Rennes, vient d’annoncer un véhicule d’investissement doté de 70 millions d’euros “dédié à accompagner la croissance durable des entreprises innovantes de la croissance bleue”.

Nos travaux et recherches sur l'économie bleue identifient le potentiel de solutions propres à chaque secteur. Cependant, au-delà de l’approche sectorielle, nous soulignons l’importance d’une approche globale de l'économie bleue pour plus de cohérence dans les nécessaires arbitrages.

Quels sont les avantages d’une approche intégrée de la croissance et du développement durable de l’économie maritime ?

Nous pensons que seule une approche intégrée peut garantir que les ressources marines sont exploitées de manière à la fois efficace, responsable et équitable. Depuis plus de dix ans, PwC analyse les usages des ressources marines dans le cadre du projet international HELM, qui suit les tendances émergentes des secteurs qui dépendent des mers et des océans.

Dans un contexte de tension autour des ressources naturelles, notamment énergétiques, et de défis climatiques, l’économie de la mer représente un cadre d’analyse et de développement à la fois passionnant et urgent au regard des enjeux actuels de préservation et valorisation de ce capital naturel.

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Vladislava Iovkova

Vladislava Iovkova

Associée, stratégie des entreprises, Strategy& France

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